mercredi 30 septembre 2015

La démarche portraits manipulés

PORTRAITS MANIPULÉS

Je pratique le portrait depuis que je suis photographe. Depuis quelques années, j’ai éprouvé le besoin d’évoluer dans ma pratique et de penser un dispositif différent faisant éclater la notion de champs et de hors-champs. La relation que nous entretenons avec notre image s’est transformée. L’avénement de la photographie numérique n’y est pas pour rien. Lorsque je photographie un enfant, il se précipite vers l’appareil pour voir aussitôt son image sur l’écran. Il n’est pas rare qu’un passant photographié souhaite exercer un contrôle sur la destination d’une image faite à la volée. J’ai le sentiment que le travail du photographe doit composer avec ces changements.

J’ai donc souhaité associer le sujet photographié à la réalisation de son portrait. 
C’est ce que j’ai mis en oeuvre pour la première fois avec les élèves de l’Ecole Supérieure Nationale des Arts de la Marionnette en 2005. J’ai depuis multiplié les expériences dans des champs sociaux divers (voir photos pages suivantes). J’adopte toujours le même protocole: je commence par un entretien où je cherche avec la personne que je vais photographier une début d’histoire : ce peut-être à la fois très personnel ou alors complètement fictif.Tout ceci est un jeu qui pose comme règle que tout ce qui sera présent dans l’image le sera par choix. Il s’agit ensuite de tout mettre en oeuvre pour rendre visible cette image. Je participe de la mise en oeuvre de cet image autant pendant l’entretien que pendant la prise de vues.

Il ne s’agit pas de chercher la ressemblance mais d’inventer une image qui soit une représentation construite du sujet.Tout est ensuite mis en oeuvre pour réaliser cette image. Il s’agit véritablement de mettre en scène cette image.
De l’éclairer, de la 
scénographier. L’idée est que l’image réalisée soit à mi-chemin du désir du photographe et de celui du photographié. Qu’elle le représente dans une mise en scène souhaitée et acceptée en collaboration avec le photographe.Tout le travail préparatoire est comme l’esquisse de l’image finale. Le portrait est réalisé en deux temps, l’entretien et la prise de vue. Je travaille dans le champs marionnettique depuis de nombreuses années. Je collabore avec de nombreux artistes marionnettistes pour qui je réalise des images projetées sur scène ou des images de spectacle. Je souhaite dans ce nouveau projet partir à la rencontre des marionnettistes du monde entier et leur proposer de construire avec moi un portrait d’eux. L’idée est de les rencontrer dans leur univers , si possible chez eux ou alors là où il se produise.

Mes images mis en scène se fonde dans l’univers de la marionnette. J’aime ces instants où je transforme le réel en petit théâtre. C’est un domaine que j’explore de plus en plus, et je me rends compte maintenant à quel point cela vient des premières images que j’ai fait des marionnettes. C’est toujours le même dispositif qui donne parfois à penser que l’image est manipulée. Chaque image fait appel à un dispositif dont la finalité est de raconter une histoire. C’est un sorte de rébus. Ce n’est pas un hasard si cette façon de faire des images revient maintenant après avoir travaillé tant d’années avec des marionnettistes. C’est leur univers que je convoque pour ces photographies. J’aime jouer sur l’ambiguité de l’image manipulée. Ici, les images le sont de l’intérieur et n’ont pas recours aux logiciels de retouches d’images.